La mesure a fait couler beaucoup d’encre, le 1er juillet. Dans une allocution publique donnée à l’occasion de la fête d’indépendance du pays, le chef d’Etat Pierre Nkurunziza a annoncé vouloir renommer certaines places et lieux de pouvoir du pays. Une mesure qui vise à “rendre hommage à ceux qui ont sacrifié leur vie pour le Burundi”, a-t-il déclaré durant son discours.Les habitants devront bien s’y faire : stade, routes, camp militaire… de nombreuses infrastructures vont être entièrement renommées. Parmi ces dernières, le palais présidentiel qui sera désormais appelé Ntare Rushatsi’s House, du nom du premier roi du pays. Le hall de l’Assemblée nationale, en cours de construction à Gitega, la capitale, prendra le nom de Louis Rwagasore, premier président du Burundi.L’avenue du 3-Novembre est débaptisée pour devenir l’avenue du Général Adolf Nshimirimara, du nom d’un ancien fidèle du président, assassiné en 2015. Quant à l’aéroport international de Bujumbura, il prend le nom de Melchior Ndadaye, premier président démocratiquement élu en 1993. Pierre Nkurunziza a également annoncé dans ce cadre la mise en place d’une commission d’experts, qui aura trois mois pour trouver les appellations des bâtiments anciens et nouveaux. Une mesure controverséeLa mesure se veut symbolique et marque une prise de distance du Burundi avec son héritage colonial. Ancienne colonie allemande, puis belge, le pays devient indépendant en 1962, notamment grâce à l’action du leader nationaliste Louis Rwagasore. Le président, qui dirige le pays depuis 2005, souhaite également vanter la modernité du Burundi.Sa décision n’en demeure pas moins controversée, dans un contexte politique tendu à l’approche de la présidentielle du 20 mai 2020. Elle a ainsi suscité de vives critiques sur les réseaux sociaux, notamment au sein de la société civile en exil, comme le montre le tweet de Teddy Mazina, photojournaliste burundais résidant en Europe :
Choisir le jour de l’indépendance pour effacer le nom du Prince héro et martyr du stade P.L. #Rwagasore est un blasphème national… une insulte et une trahison à sa mémoire et à celles de ses camarades sacrifiés àpres lui. #Mirerekano, #Ndayahoze, #Siryuyumusi #Ngendandumwe https://t.co/zEzzoFl0vY pic.twitter.com/0XxW2BlLcw — TEDDY MAZINA (@TEDDYMAZINA) 30 juin 2019
Jean Minami, leader de l’opposition burundaise également en exil, raconte de son côté au micro de France 24 : “(cette mesure) signe une ligne de division, unique (…). Le pays, ça ne va pas, tous les prix s’enflamment, il n’y a pas de sécurité, on ne peut rien faire, rien dire. Toute cette population en a marre.”L’élection présidentielle de 2020 inquièteLe président burundais n’a d’ailleurs pas mâché ses mots durant son allocution et vertement critiqué les puissances occidentales qui, de leur côté, pointent régulièrement du doigt le non-respect des droits de l’Homme dans le pays.“L’histoire électorale du Burundi, y compris lors du référendum constitutionnel de l’année dernière, a toujours été marquée par de la violence et de graves violations des droits de l’Homme”, a récemment jugé Doudou Diène, président de la Commission d’enquête de l’ONU sur le Burundi, ajoutant que “le contexte pré-électoral actuel en montre déjà des signes inquiétants”.Le pays est entré en crise en avril 2015, après que le président Pierre Nkurunziza a annoncé sa candidature à un troisième mandat controversé, et a été réélu en juillet de la même année. Les violences et la répression qui ont accompagné cette crise auraient fait au moins 1200 morts et déplacé plus de 400 000 personnes entre avril de cette années-là et mai 2017, selon les estimations de la Cour pénale internationale.Le président burundais avait toutefois surpris les observateurs en assurant qu’il ne se présenterait pas à sa propre succession en 2020, alors que la nouvelle Constitution adoptée en 2018 le lui permet. Et à moins d’un an de l’élection présidentielle, sa candidature demeure incertaine.Click Here: NRL Telstra Premiership